jeudi 13 février 2014

Au défilé

Parade, et la fanfare s’époumone
Les grands hommes défilent dans les Mercedes et klaxonnent
Saluent la foule immense, la masse et son visage
Figé par une émotion d’usage
Et rivés sur l’écran des millions d’yeux
N’ont que regrets d’avoir dû rester chez eux
Les dieux-médias sont eux tous au même endroit
Religion polythéiste mais tous ont la même voix
Et les lois de l’audimat
Il paraît que tous les savoirs sont contenus dans la boîte
L’autre de ses mains moites salue ses électeurs
On entame une ola pour le petit protecteur
Triés sur le volet, les fans sont aux anges
Les hommes jouent des coudes, demoiselles et dames s’arrangent
Pas de traces de rage, que des sourires béats
De toute évidence c’est un vrai bonheur d’être là

Au défilé…

Au défilé il a enfilé son plus beau costume
La Merco laisse presque des traces de chenilles sur l’asphalte
Demain c’est la guerre comme le veut la coutume
Les militaires en rang approchent et la foule exalte
C’est exact, il faut saluer les héros
Et de nouveau unir le peuple sous les drapeaux
Maquillage tricolore sur les joues des têtes blondes
C’est encore pire qu’une victoire en coupe du monde
Les stars brillent, arborent leurs sponsors
Sodas, fast-foods, malbouffe et consorts
Tout ce que consomme, en somme, l’homme moyen
Standard, classique, l’homme qui n’en pense rien
Lors du discours, ils auront la main sur le cœur
Debout dans les travées, ivres de fierté
Prêts à baiser la main dudit protecteur
La même qui les frappe en prétendant les caresser

Au défilé…

Au défilé, le temps s’étire mais semble figé
On y passe sa vie sans que rien n’ait changé
J’ai vu des gens y rester, s’y retrouver vieux
Tandis que des adolescents venaient s’y faire crever les yeux
Tu m’en promets, tu m’en promets, ton parti pris est uniquement lié
A ta Rolex et ton fric
L’esthétique compte plus que l’éthique
Et je doute qu’un jour la France saoule sorte de son coma éthylique
Alors l’acte isolé à la Lee Harvey Oswald
Et sa balle magique serait peut-être la seule morale
A cette parade où même le mot paradis sent le rance
Quelle chance d’habiter la France
La fiction a refroidi la réalité
Tellement plus spectaculaire et facile à faire passer
Alors souriez, allez saluer la masse
En attendant le sniper isolé comme à Dallas

Au défilé...

The Time is Stretching